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27 novembre 2013

Alarmant...

Le portrait social 2013 de l'Insee, publié le 14 novembre, montre que 54% des enfants de CM2 ont déjà consommé de l'alcool. Ce chiffre est-il révélateur d'une nouvelle tendance ?  

Mickaël Naasila : Les premières consommations ont lieu vers 9, 10 ans. Cela peut-être une simple gorgée. C'est un constat qui résultat d'un phénomène culturel. On consomme pour la première fois de l'alcool avant tout en famille. Mais il n'y a rien de nouveau. D'ailleurs, dans les classes de CM2, les élèves savent très bien ce qu'est l'alcool.

La première exposition à l'alcool survient très tôt, le plus souvent en famille. L'enquête de l'Insee ne démontre aucun rajeunissement à ce niveau. La moyenne de la première ivresse est de 13 ans, 15 ans. A 15 ans, on n'est pas loin des 100% de personnes qui ont déjà expérimenté l'alcool. Près de 40% des plus de 15 ans ont déjà connu une ivresse.

C'est pour cela que, si des actions doivent  être menées, elles doivent commencer très tôt, dès le CM2. Si l'on veut que la prévention soit efficace dès le collège, à l'époque des premières ivresses, et même après, il faut commencer dès le plus jeune âge et poursuivre ensuite. Avec ces enfants, on ne va évidemment pas parler des enjeux de l'alcool mais d'autres aspects qui sont liés, comme l'estime de soi par exemple. Ils sont très réceptifs : ils savent qu'il faut se laver les dents, que leurs parents ne doivent pas téléphoner au volant, par exemple.

Marie Choquet : "Avoir consommé de l'alcool" in fine ne veut rien dire. Tout dépend de la quantité et de la régularité de cette consommation. Il s'avère qu'en France la consommation régulière baisse, y compris chez les jeunes, alors que la consommation occasionnelle en quantité importante augmente. Surtout, même si la première expérience avec l'alcool survient tôt, la première ivresse se situe plutôt à 15 ans, pas en CM2 !

Si la première consommation se fait plutôt en famille, avec, dans la grande majorité des cas un contrôle de la quantité, la première ivresse se fait plutôt entre copains, sans contrôle de quantité, voire le contraire, dans un contexte de surenchère. Cette première ivresse est la plus délétère, et comporte le plus de risque à terme. Ce qui fait dire au chercheurs que ce n'est pas la première consommation qui importe, mais la première ivresse. C'est cette première ivresse qui constitue un "rite initiatique" (même si ce terme n'est pas très adapté), il s'agit en tout cas d'une première transgression, qui la plupart du temps reste inconnue des parents et des adultes responsables.

Si cette transgression est accompagnée d'effets positifs comme l'oublie, le plaisir, la valorisation par les pairs, etc. elle comporte des dangers majeurs comme le risque de répétition et donc, à terme, de dépendance.  

Il y a deux cas de figure : lorsque cette consommation a lieu en famille ou entre enfants. Dans les deux cas, quels sont les facteurs qui poussent les enfants à boire de l'alcool ? Existe-il des prédispositions culturelles ou conjoncturelles qui permettent à un enfant de boire de l'alcool ?

Mickaël Naasila : Il y a la pression des pairs, avec un fort effet de groupe. Si ses camarades boivent, un enfant va être plus enclin à boire lui-aussi. Les facteurs sociaux et familiaux sont également déterminants, évidemment. Il y a également des facteurs génétiques et environnementaux. Ce sont eux qui prennent le dessus. Le fait d'avoir des parents qui boivent est bien sûr un facteur favorisant. En revanche, les conditions sociales ont moins d'influence qu'il n'y parait. On pourrait penser que les enfants qui vivent dans des milieux défavorisés sont plus enclins que les autres à boire de l'alcool mais c'est faux.

On a l'habitude de voir la prise d'alcool à certaines occasions et il y a un effet de banalisation. L'alcool a une dimension culturelle et est tellement banalisé, il ne faut pas s'étonner de son incidence sur les gens et les enfants.

Marie Choquet : Il convient d'être plus attentif à ce phénomène et à l'attitude de l'entourage familial. S'il y a banalisation, approbation  ou valorisation, le risque de répétition est certain. Si, au contraire, il y a désapprobation, le risque de répétition est moindre, même s'il n'est pas totalement exclu. En effet, la recherche répétée d'ivresse est liée à plusieurs facteurs : la pressions du groupe et  à la recherche de sensations fortes, un facteur encore plus vrai chez les garçons qui ont besoin de s'affirmer vis-à-vis des autres, au désir d'oubli et au besoin de lutter contre de la déprime, voire la dépression, surtout chez les filles.

Il y a également l'attitude parentale envers l'alcool - et leur propre consommation excessive - et à l'investissement des parents vis-à-vis des jeunes...  Si un jeune est déprimé, qu'il a subi des violences (physiques, sexuelles ou verbales à répétition), si ses parents le rejettent ou ne négligent, le risque de répétition de l'ivresse est bien supérieur que si le jeune est sociable, qu'il investit l'école, que ses parents sont à l'écoute et que l'ambiance familiale est ouverte et agréable.

Il convient donc, dans un but préventif, de prendre en considération l'ensemble du contexte de vie des jeunes et d'agir à plusieurs niveaux (information, bien être familial et scolaire, écoute du mal être).

Quelles peuvent être les conséquences à plus ou moins long terme ? Un enfant qui boit de l'alcool jeune aura-t-il plus de chance de devenir alcoolique ?

Mickaël Naasila : Je ne dirai pas qu'une gorgée entraînera forcément un alcoolisme. Il y a des facteurs individuels, familiaux.  On se rend compte surtout que le fait que les parents sachent ce que font leurs enfants en dehors de l'école diminue le risque que ces enfants-là boivent. Les parents ont dont un rôle très important. Ceux qui sont pro, sont qui sont anti, etc. Leur comportement influence évidemment leurs enfants.

L'un des gros problèmes c'est que personne ne parle d'alcool, à part les journalistes dans les faits divers. Mais c'est difficile. Comment dire à son enfant qu'il ne faut pas boire alors que l'on boit soi-même ? 



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